"fussent-ils moins beaux" (Banquet 19)
On retrouve un peu d'humanité dans ces mots. Pausanias exprime cet idéal moral: les citoyens devraient choisir leurs amants parmi les jeunes gens( "bien nés") sans que la beauté physique soit décisive dans ce choix. L'amour homosexuel pourrait-il mieux que l'amour hétérosexuel satisfaire cette exigence? Quelques réflexions me viennent en roulant vers Saint-Lô.
Je ne sais si la cadre de la cité antique-je pense à l'Athènes du Vème siècle - se prêtait bien à ce désintéressement. Le stade où se nouaient beaucoup d'idylles masculines mettait en valeur les gaillards les plus athlétiques. Partout la statuaire exposait aux regards le canon d'un homme aux proportions idéales...
Le milieu gay d'aujourd'hui laisserait entrevoir un monde parfois féroce où l'apparence et les codes vestimentaires ont force de loi. Quelqu'un me confiait: il arrive un âge (trente ans, quarante ans?)où tu deviens transparent. Les autres littéralement ne te "voient" plus...
Pourtant l'amour homosexuel peut par sa nature se soustraire à cette dictature des apparences. Il n'y rentre par définition aucun souci de se perpétuer et donc échappe à toute tentation eugéniste. Le charme viril opère sans artifice. L'amour évoqué ici dans le Banquet ne recherche pas le parfait mais le perfectible, non pas le beau acquis mais le beau en devenir. Le souci esthétique et éthique qu'il renferme est un processus, ou mieux une éducation. Dans cette perspective-que je fais mienne- nul n'est exclu à priori. Le temple de l'amour platonicien n'est pas une boîte branchée. Il n'y a pas d'"entrée réservée"!