Retour vers Athènes, le plaisir et Aristote

Le temps est moins beau qu'à l'aller. Des nuées douces estompent ce paysage d'îles et d'îlots. Une lumière louche donne à ces paysages marins une allure un peu fantomatique. Des oiseaux invisibles crient. L'air est devenu un peu frais. Nous ne resterons pas sur le pont.

Assis dans mon fauteuil, je lis et somnole. J'ai repensé à cette idée du plaisir comme restauration de la nature. Voilà pourquoi une chose plaisante peut paraître désagréable dès que la nature est reconstituée. Ainsi les plaisirs de la table: le passage des plats qui tout à l'heure procurait la jubilation des papilles provoque une fois rassasié un certain écoeurement. De même la bière devient bien amère quand je n'ai plus soif. Et que dire du plaisir sexuel une fois assouvi? Le pendule va parfois du désir au dégoût.

Aristote estimant que le plaisir est une activité, il peut être une fin en soi. Et s'il  est une activité, nous y exerçons nos capacités. Comme toutes les capacités, les plaisirs s'acquièrent et se développent. Timidement, notre enseignement contourne un domaine qui la gêne et tente d'éduquer au goût, d'éveiller les sensibilités...

Aristote pense que le plaisir est le lieu de notre vie  où on se libère des entraves, bref où on fait l'expérience de la liberté.

Je sens de plus en plus combien il est primordial de donner aux enfants et aux adolescents le plaisir d'apprendre. Tout bonnement parce que le plaisir qu'on tire de l'étude va faire qu'on étudie davantage...

Sur le siège devant nous, un petit garçon mange des frites. Parfois il oublie son plaisir, puis le reprend, ou encore il s'amuse avec sa nourriture et pousse sa frite sur la vitre, ou le long de la tablette, comme il pousserait une petite voiture ou un avion, puis la mange(sic!)...