Ich lebte in Bildern
Günter Grass se souvient qu'enfant, il collait dans des albums des images de cigarettes illustrant des périodes de l'Histoire de l'art. Avec cette recherche obstinée de l'exhaustivité("der Sohn war so beharrlich auf vollständigkeit aus") propre à tout collectionneur, l'enfant échangeait inlassablement ses images.
J'ai eu ausssi mes images: les plus anciennes étaient des vignettes d'art, d'Histoire et de sport que je collais dans des albums de la caisse d'Epargne. Un portrait de Diderot, des scènes galantes du XVIII ème siècle, une montgolfière, la nageuse,le lanceur de base-ball me sont restés en mémoire. Plus tard un distributeur de carburants proposa des séries animalières et nous allions à pied avec maman chercher des images jusqu'à une station essence de Rennes loin de chez nous. Pendant des années les images de chocolat Poulain s'accumulèrent en d'énormes piles serrées dans des élastiques ou éparpillées dans le désordre toujours plus déplorable de mon pupitre.
Parallèlement à l'apprentissage de l'écrit se développait une culture des images. Celles-ci donnaient une substance et un contour à ce que j'apprenais; mais elles recouvraient aussi les choses de charme et de mystère; ce qui était particulièrement vrai des reproductions de tableaux: l'art parvenait dans le cerveau du petit garçon avec de grands points d'interrogation. La grande collection d'images accumulait en moi une fabuleuse réserve d'icônes mentales où les savoirs, le rêve, et la sensualité puiseraient plus tard.
J'ai conscience du rôle des images dans le goût que j'ai encore de la géographie, de l'Histoire et même du sport (paradoxale motivation du mouvement par ce qui est fixe!)...